samedi 12 avril 2008

ELECTION EN ITALIE

Des élections générales anticipées auront lieu en Italie les 13 et 14 avril 2008[1] après que le président Giorgio Napolitano a dissous le Parlement italien, le 6 février 2008, suite au renversement du second gouvernement de Romano Prodi, lors d'un vote de confiance au Sénat où la majorité ne tenait qu'à un fil[2]. Cette décision d'aller aux urnes a été prise suite à l'échec de l'initiative présidentielle visant à nommer à la présidence du conseil une personnalité neutre, capable de former un gouvernement de transition en vue de réformer la loi électorale, jugée trop propice à l'émiettement politique. En vertu de la loi italienne, les élections doivent avoir lieu dans les 70 jours qui suivent la dissolution.




le mode de scrutin :


Les 630 députés (de la Chambre basse) sont élus via un système mixte, sur une base proportionnelle avec prime majoritaire. Concernant les coalitions, la loi électorale prévoit que seules celles obtenant au moins 10 % des suffrages exprimés au niveau national puissent accéder à la répartition des sièges, à la représentation proportionnelle, dans le cadre de 26 circonscriptions législatives. Au sein de ces coalitions, les sièges sont distribués entre les listes ayant obtenu au moins 2 %, ainsi que parmi celles ayant obtenu le plus de voix juste en dessous de ce seuil. Concernant les partis se présentant seuls, ils doivent obtenir au moins 4 % des suffrages exprimés, également au niveau national, pour se voir attribuer des sièges. En outre, la loi permet à la coalition (ou au parti) ayant obtenu le plus de voix de recevoir au moins 55 % des sièges de la chambre des députés (soit 340 sièges), les sièges restants étants répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle.


Les 315 sénateurs (de la Chambre haute) sont élus dans le cadre des vingt circonscriptions régionales. Dans chaque région, la liste arrivée en tête reçoit directement 55 % des sièges à pourvoir, les sièges restants étant répartis à la proportionnelle entre toutes les listes qui ont dépassé 8 % des voix.


Le contexte

Le 16 janvier 2008, le ministre de la Justice, Clemente Mastella (Union des démocrates pour l'Europe, Udeur), a présenté sa démission du gouvernement de Romano Prodi, invoquant la campagne d'accusation dont il faisait l'objet et le manque de solidarité gouvernementale pour justifier sa décision[3]. Soupçonné d'avoir fait pression sur le gouverneur de la région de Campanie pour obtenir la nomination d'un de ses proches à un poste de responsabilité, M. Mastella a découvert peu avant sa démission que lui et toute sa famille avaient été placés sur écoute. En conséquence, l'Udeur décidait de se retirer de L'Union, la coalition de centre-gauche soutenant Romano Prodi. Celui-ci devait alors faire face à sa mise en minorité au Sénat et réclamer la confiance du Parlement.
Le régime parlementaire italien est caractérisé par un bicaméralisme égalitaire, ce qui veut dire que les deux chambres du Parlement ont exactement les mêmes pouvoirs. Si l'Union se trouvait être largement majoritaire à la Chambre des députés lors du vote de confiance, il en allait tout autrement au Sénat, où elle perdait, avec le départ des sénateurs de l'Udeur, sa fragile majorité absolue. Ainsi, alors que la Chambre des députés lui accorde sa confiance le 24 janvier, par 326 voix pour et 275 voix contre, le Président du Conseil perd la confiance du Sénat par 156 voix pour et 161 voix contre, et se retrouve de facto contraint à la démission. Peu après l'avoir fait, Romano Prodi a déclaré vouloir se retirer de la vie politique[4].


Le gouvernement Prodi aura duré au total 650 jours, devenant le deuxième plus court de l'histoire de la République italienne. Il s'agit en outre de la huitième législature qui ne va pas jusqu'à son terme. Ce gouvernement comptait 102 membres issus de 10 partis politiques différents, allant des communistes (dont le parti d'extrême gauche Refondation communiste) au centre-droit démocrate chrétien. Sujet à de multiples mouvements de balancier entre son aile gauche et son aile droite, il a souvent dû faire face à de graves dissensions et M. Prodi a souvent dû s'appuyer sur le soutien des sénateurs à vie, l'Union ne disposant que d'une avance de 2 sièges sur l'opposition au Sénat. Ces conflits au sein de sa majorité l'ont contraint à abandonner certaines de ses promesses électorales, comme l'instauration d'une union civile pour les couples homosexuels[5].

Les enquêtes d'opinion révèlent que deux italiens sur trois étaient favorables à l'organisation d'élections anticipées après la chute du gouvernement. Bien que le patronat[7], la conférence épiscopale et de nombreux représentants de la société civile y étaient opposés, le chef de la droite italienne, Silvio Berlusconi, a plaidé pour l'organisation immédiates d'élections générales anticipées[8]. A contrario, le chef du Parti démocrate (PD), Walter Veltroni, s'était dit favorable à une modification préalable de la loi électorale, invoquant les très fortes dissenssions au sein de la majorité sortante et leur influence néfaste sur la stabilité gouvernementale et la cohérence
Politique[9].




les candidats

Les principaux concurrents au poste de Président du conseil sont Silvio Berlusconi, en tant que leader de l'opposition de droite, et Walter Veltroni, le chef du Parti démocrate (centre-gauche).

L'ancien Président du Conseil, Silvio Berlusconi, est candidat pour la cinquième fois. En 1994, il avait révolutionné la communication et la vie politique italienne. En 2001, il devenait le premier Président du Conseil à avoir terminé son mandat de 5 ans.
Le 12 décembre 2007, date anniversaire d'une grande mobilisation des forces de l'opposition contre le gouvernement de Romano Prodi, M. Berlusconi fonde le parti du Peuple de la liberté (PDL) coalition de droite comprenant son parti, Forza Italia, les nationalistes de l'Alliance nationale (AN doit se dissoudre totalement dans le PDL d'ici son prochain congrès) et différentes petites formations politiques d'horizons divers[10]. Elle est alliée à la Ligue du Nord, parti fédéraliste et populiste situé très à droite sur l'échiquier politique[11] qui se présentera encore seule dans le nord de l'Italie tandis que dans le Mezzogiorno, le Mouvement pour l'autonomie, bien implanté en Sicile fait de même. Le Peuple de la liberté est donné favori, en début de campagne, par diverses enquêtes d'opinion[12], mais cette avance semble fondre courant février et mars.


Silvio Berlusconi, surnommé Il Cavaliere (chevalier), s'inscrit ainsi dans la lignée de Walter Veltroni, contribuant à bouleverser le paysage politique italien, jusque là dominé par un très fort émiettement politique et la formation de vaste coalitions. Le PDL, se voulant un grand parti fédérant les forces politiques ne se reconnaissant pas dans la gauche, a jusqu'à maintenant surtout capté des partisans du côté de la droite dure. À titre d'exemple, Alternative sociale, le parti d'Alessandra Mussolini, petite-fille de Benito Mussolini, doit à terme rejoindre le PDL, tandis que l'UDC (Union du centre) a rompu avec la droite italienne après 14 ans d'alliance[13]. Silvio Berlusconi en appelle malgré tout à la modération, se disant même favorable à la formation d'une grande coalition avec le Parti démocrate[14].


Le 9 février 2008, le chef de l'opposition a en outre fait part de ses ambitions de contribuer à faire de la République italienne un système politique bipartisan, affirmant qu'il souhaiterait voir s'établir en Italie une "République fondée sur deux piliers qui cultivent de grands projets" tout en précisant qu'il ne considère pas le Parti démocrate comme un ennemi. Cette volonté d'ouvrir le dialogue avec la gauche pousse des analystes politiques à prêter à Silvio Berlusconi l'ambition de devenir Président de la République[15]. Devenu figure historique de la vie politique italienne, M. Berlusconi aura survécu à son vieil ennemi, Romano Prodi, qui a finalement abandonné sa carrière politique.
Allié au petit parti de l'Italie des valeurs et aux Radicaux italiens, le PD englobe la majeure partie du centre-gauche de gouvernement italien depuis sa fondation, quelques mois avant les élections, sur la base d'une fusion entre les Démocrates de gauche (sociaux-démocrates) et La Margherita (centre-gauche démocrate-chrétien). Suite à l'annonce de l'organisation d'élections anticipées, M. Veltroni a déclaré que son parti ne passerait aucune alliance avec d'autres partis, choisissant plutôt de concourir seul avec sa propre plate-forme, optant ainsi pour une stratégie différente de celle utilisée par Romano Prodi depuis des années (coalitions dite de L'Union et de L'Olivier). Les deux seules exceptions à ce cavalier seul sont donc l'alliance avec l'Italie des Valeurs, chacun présentant sa propre liste, et l'alliance plus étroite avec les Radicaux, ces derniers ayant neuf parlementaires réservés sur les listes du PD.


Se voulant incarner une rupture définitive avec l'expérience de 1921 à Livourne, théâtre de la scission de l'ancien Parti socialiste italien (PSI) et de la fondation du défunt Parti communiste italien (PCI), le PD serait aussi, selon ses fondateurs, un moyen d'empêcher la formation d'une force autonome située au centre de l'échiquier politique[16]. Aux primaires d'octobre 2007, Walter Veltroni, qui a recueilli près de 3 millions de voix sur son nom, a été élu Premier secrétaire du parti.


En choisissant de faire concourir seul son parti, M. Veltroni veut contribuer à rendre le centre-gauche plus visible et plus organisé, souhaitant à terme en finir avec la tradition italienne des grandes coalitions hétéroclites[17]. Voulant à la fois rompre avec la gauche radicale et les petits partis centristes, comme l'UDEUR, qui a provoqué la chute du gouvernement Prodi, M. Veltroni veut se doter d'un programme clair et s'affranchir des tactiques de médiation et de la logique du compromis ayant animé jusqu'à maintenant la gauche italienne[18].
Ouvert à des alliances basées sur une adhésion à son programme, le PD a déjà obtenu le soutien des Radicaux italiens de Marco Pannella et d'Emma Bonino, cette dernière pouvant en outre espérer obtenir un poste ministériel en cas de victoire[19]. L'annonce de cette alliance créa immédiatement des conflits avec la tendance catholique du PD sur les question de société, mais ce clivage idéologique a été balayé d'un revers de la main par Walter Veltroni, qui lui trouve un côté archaïque[20].
Évitant de prononcer le nom de son adversaire, Silvio Berlusconi, dans un souci d'écarter toute éventualité de diabolisation de ce dernier de sa part, M. Veltroni souhaite mettre fin à "une ère de querelles et de haines". Fin 2007, il a ainsi cherché à dialoguer avec le leader de l'opposition sur la modification de la loi électorale, recevant l'hostilité d'une partie de la gauche italienne, l'accusant de vouloir redonner à M. Berlusconi une légitimité alors même que le centre-droit le quitte, ou même de chercher à contribuer à la chute du gouvernement Prodi pour satisfaire à ses ambitions personnelles[21].

Malgré les risques que font peser la loi électorale sur une stratégie solitaire, cette initiative a été saluée par bon nombre d'observateurs politiques, qui y voient un moyen de clarifier et de renouveler le paysage politique italien[22]. Affichant sa différence avec Romano Prodi et se voulant un homme neuf en comparaison de l'ancienneté de Silvio Berlusconi sur la scène politique, Walter Veltroni incarne un leader politique jeune et audacieux[23].




Autres forces en présence:

La Gauche - l'Arc en ciel, menée par Fausto Bertinotti, englobe les principaux partis de la gauche parlementaire, en dehors du PD, à savoir Refondation communiste, le Parti des communistes italiens, les Verts et Gauche démocrate, nouveau parti rassemblant d'ex-membres des Démocrates de gauche défavorables à la création du PD. Les résultats cumulés obtenus par les trois premiers en 2006 atteignent 10,2 % des suffrages exprimés, cette coalition a donc une chance de franchir le seuil des 10 % des suffrages exprimés pour accéder à la répartition des sièges au sein de la Chambre des députés. La bonne implantation de Refondation communiste dans certaines régions peut également lui assurer quelques sièges au Sénat.

L’Union du Centre, constituée surtout par l’Union des démocrates chrétiens et du centre (UDC), parti de centre-droit conduit par Pier Ferdinando Casini, qui a, pour la première fois depuis quatorze ans, refusé de s'allier à Silvio Berlusconi, préférant se présenter seul aux électeurs (voir détails ci dessous). En 2006, l'UDC a rassemblé 6,8 % des voix dans les deux chambres, et a donc de bonnes chances d'être représentée à la Chambre des députés. Elle se présente avec le symbole Union du Centre (et non UDC), pour tenir compte de son alliance avec la Rose blanche, scission de l'UDC menée par Bruno Tabacci, s'inscrit dans une ligne de rejet en bloc du système institutionnel en place et prône l'avènement d'un système similaire à celui de l'Allemagne. Elle s'allie in fine à l'UDC de Casini sous le nom d’Union de Centre).

D'autres petits partis ont présenté d'autres candidats au poste de Premier, parmi ceux-ci, il faut retenir ceux qui obtiennent aux alentours de 1 % (±) lors des différents sondages, score qui ne devrait normalement pas leur permettre d'être représentés à la Chambre des députés :


-Le nouvellement recréé (2007), Parti socialiste devrait se présenter seul avec Enrico Boselli comme candidat Premier ministre ;

- La Droite, menée par Daniela Santanchè ;


-Le Parti communiste des travailleurs de Marco Ferrando incarnera l'extrême gauche.


Les autres partis capables d'être présents dans toutes les circonscriptions (chambre et sénat) sont :

-Flavia D’Angeli, soutenue par la Sinistra Critica ;


- Stefano de Luca, soutenu par le Parti libéral italien ;


-Bruno De Vita, soutenu par l'Unione Democratica per i Consumatori ;


-Clemente Mastella, soutenu par l'UDEUR mais qui renonce le 6 mars 2008 se présenter.


si je devais voter je voterais pour le parti démocrate pourquoi d'abord parce que je suis de gauche et puis parce que ce parti a ligne politique et un projet resolument moderne
Certes, cette opération politique originale est fille de particularités nationales qu'on ne saurait pas transposer automatiquement en France. Qui plus est, elle n'en est qu'à ses balbutiements, et des premières fissures apparaissent déjà dans l'édifice commun. D'abord, elle ne fait pas l'unanimité chez les anciens communistes, et l'un de leurs piliers historiques, Fabio Mussi, a d'ailleurs annoncé qu'il ne suivra pas. Ensuite, les deux mouvements fondateurs ne s'accordent pas sur le positionnement européen du futur «Parti démocrate». Les uns, avec la Margherita ont soutenu François Bayrou pendant la campagne du premier tour en France. Les autres, chez les DS, ont soutenu sans hésitations la socialiste Ségolène Royal. Ce décalage est ensuite très marqué pour ce qui est de la future adhésion du «Parti démocrate» à l'un des groupes existants au Parlement européen : Rutelli & Co, qui actuellement siègent avec l'UDF dans l'Alliance des libéraux démocrates, refusent catégoriquement de se rallier au Parti socialiste européen.
Mais au-delà de ces différences, le souci d'unité du centre-gauche italien peut être un exemple pour la France. A un moment où Ségolène Royal a besoin des voix de François Bayrou pour s'imposer dans le duel qui l'opposera à Nicolas Sarkozy le 6 mai prochain, une alliance avec le leader centriste pourrait lui être fort utile. Et non seulement sur le plan tactique. Si elle veut véritablement «réformer la France», elle ne pourra pas s'appuyer sur des micro-partis paléo-communistes tels que l'incroyable Ligue communiste révolutionnaire (sic) d'Olivier Besancenot. Qui plus est, le PS est un mammouth irréformable et d'ailleurs le choix de miser sur «Desirs d'avenir» démontre que la candidate le sait. Si son modèle c'est la social-démocratie scandinave, elle aura besoin de refonder, avec l'UDF et avec des personnalités populaires telles qu'un Kouchner ou un DSK, un nouveau pacte présidentiel qui fasse enfin le choix d'un capitalisme au visage humain. Et non pas de l'anti-libéralisme, souvent obtus, qui flirte avec l'extrême gauche anti-européenne.

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